Entretien…. par Hermane Silombo pour Baolactu

Cela fait sept ans que le Groupement polyvalent de recherches et de répression de la fraude (Gpr) mène ses activités dans la région de Thiès. Peu connue du grand public, cette unité d’élite des douanes sénégalaises participe pourtant à la lutte contre la fraude sous toutes ses formes. Dans cet entretien avec Baolactu.info, le chef du GPR, le lieutenant-colonel Mamadou Dieng Sow revient largement sur les saisies, les missions mais également sur les perspectives de cette unité spéciale.

Quel est le véritable rôle du GRP qui est une unité d’élite des douanes sénégalaises ?

Le Groupement polyvalent de recherches et de répression de la fraude (Grp) est une unité un peu spéciale, spécifique, comparée aux directions régionales, aux subdivisions et aux bureaux des douanes. C’est une unité qui a une compétence nationale. Elle peut intervenir partout dans ce pays et dépend directement du directeur des opérations douanières, qui est la direction centrale en termes de lutte contre la fraude et de dédouanement. Elle lutte également contre la criminalité transnationale, les crimes organisés et le blanchiment des capitaux.

Pourquoi est-elle basée à Thiès et non à Dakar ?

Cette unité est basée à Thiès comme elle pouvait l’être à Saint-Louis ou à Dakar. Mais, les autorités douanières l’ont amenée dans cette région pour des raisons purement stratégiques, compte tenu surtout de la position stratégique de la ville. Thiès est une région carrefour où passent toutes les marchandises et toutes les personnes qui quittent Dakar pour aller à l’intérieur du pays. Il y a actuellement trois issues. La première, c’est l’axe Mbour-Dakar. La deuxième, c’est Thiès-Dakar et la troisième, c’est l’axe Mboro-Notto-Bayakh-Sangalkam et Dakar. Donc notre unité intervient spécifiquement dans le cadre de la lutte contre la fraude sous toutes ses formes et dans le cadre du contrôle des opérations commerciales. On contrôle également toutes les marchandises qui quittent les bureaux frontaliers notamment avec les pays voisins : la Gambie, la Mauritanie, la Guinée…Donc tous ces flux de marchandises font également l’objet d’une contre-visite par le GPR. Au-delà, nous intervenons également dans le cadre de la lutte contre la drogue, les trafics illicites…

Pouvez-vous nous faire l’économie du nombre d’individus arrêtés et des saisies qui ont été effectuées par le GPR dans le cadre des opérations de lutte contre les stupéfiants ?

Depuis que je suis porté à la tête du GPR (plus de huit mois), on n’a pas spécifiquement arrêté un trafiquant de drogue. Par contre, en 2014, il y a beaucoup de saisies en matière de drogue, notamment du chanvre indien. L’année dernière (2016) quand je suis arrivé, il y a eu des trafiquants qui ont été arrêtés en matière de faux de médicaments. On a eu à arrêter à deux reprises des cargaisons importantes de faux médicaments qui devraient être acheminées dans les grands centres urbains. Chaque saisie faisait plus d’une tonne de médicaments (déjà incinérés). Nous avons effectué une saisie de 1,5 tonnes dont le montant se chiffre à une dizaine de millions de F Cfa. Toujours au courant de l’année 2016, on a également eu à faire des saisies dans le littoral, vers le département de Mbour, des cuisses de poulets impropres à la consommation et qui devraient être acheminées dans la capitale. La capacité est estimée à 3 tonnes pour un montant global qui tourne autour de 5 à 6 millions de F Cfa. Ce sont des trafics illicites que le GPR a eu à démanteler. Les trafiquants ont été arrêtés et traduits devant la justice pour la plupart. Et donc nous allons continuer à travailler pour protéger les populations et notre économie nationale. Tout ceci nous a permis de réaliser en termes de recettes contentieuses 1 milliard de F Cfa. Cette somme est déjà versée au niveau de la trésorerie régionale de Thiès.

Le GPR compte deux brigades et chacune fonctionne avec un effectif réduit de 5 agents y compris le chef de brigade. Cela n’influe pas sur la qualité de votre travail ?

Effectivement ! Nous sommes confrontés à un déficit de personnel. Si vous prenez le GPR dans sa globalité avec l’étendue même de ces compétences, on estime que nous avons un effectif très réduit. Nous avons deux brigades : la brigade polyvalente n°1 et 2. Et chacune dispose seulement de cinq agents. Cependant, nous avons saisi notre supérieur hiérarchique, dans le cadre du rapport annuel d’activités global pour le renforcement de nos unités. D’ailleurs, nous allons profiter de cet effectif pour redynamiser une nouvelle section qu’on appelle la section motorisée. Avant d’être rebaptisé le GPR, on l’appelait Groupement d’intervention rapide (Gir). Les agents du GIR intervenaient sur les opérations en motards. Au regard de l’évolution de la fraude, cette section a été délaissée. Mais, aujourd’hui, elle doit être redynamisée dans la mesure où le Sénégal s’est engagé dans le renforcement des infrastructures routières avec les autoroutes à péage. Il y a l’autoroute Dakar-AIBD-Sindia et Ila-Touba. C’est pour cette raison que nous voulons redynamiser cette section pour permettre une intervention plus rapide des agents sur le terrain et effectuer un contrôle sur les marchandises en mouvement sur les grands axes routiers. Cette section sera logée au GPR et c’est l’une des innovations que nous comptons mettre en œuvre d’ici quelques mois. Des agents sont déjà formés pour ça. Et je crois que dans un court terme, la redynamisation de la brigade motorisée au niveau du GPR sera effective.

Et quelle sera la mission de la brigade motorisée ?

Elle va contrôler les marchandises sur tout le long des autoroutes à péage. En outre, elle va cibler les camions, les marchandises qui sont en mouvement. Elle y sera également pour intervenir très rapidement en cas de suspect sur ces grands axes routiers.

Pourquoi avez-vous jugé nécessaire de mettre en place un barrage fixe à la sortie de Thiès ?

Et bien parce que nous voulons renforcer le contrôle des flux de marchandises entrant ou sortant de Dakar. C’est le cas des conteneurs qui quittent la capitale en partance pour l’intérieur du pays. Donc, il faut que nous exercions une contre-visite de ces conteneurs. Les camions également qui débarquent des bureaux frontaliers : Kidira, Rosso, Karang, Keur Ayib… font aussi l’objet de contre-visite. Donc, le barrage a pour rôle de renforcer le contrôle des flux de marchandises, la lutte contre la fraude et la lutte contre les trafics illicites parce qu’il nous arrive de faire des ciblages pour contrôler et exploiter un renseignement sur un trafiquant et un convoi de trafic. C’est ce qui justifie un peu l’érection de ce barrage. Au début, les agents opéraient la nuit au niveau de la station Edk et cela créait un ‘’désordre’’ au niveau de cette zone, car, on immobilisait beaucoup de camions. En rapport avec le préfet de département et le commandement du corps urbain, nous avons décidé d’ériger ce barrage. Par ailleurs, en vue de mieux renforcer le maillage du contrôle au niveau de la région de Thiès, nous mettons un check-point nocturne au niveau de Sindia parce qu’actuellement les gens peuvent directement emprunter l’autoroute à péage à partir de cette localité sans compter également les patrouilles que nous effectuons le jour comme la nuit. Malgré la faiblesse de nos effectifs, nous essayons en tout cas de planifier la gestion de ces ressources pour pouvoir remplir pleinement la mission qui nous a été confiée.

Hermane Silombo